Pour finir par s'y retrouver, il fallait avoir commencé à y glisser. Et pour cela, il faut bien comprendre que la vie avait toujours préparé le terrain comme il se devait. Souvent ça avait commencé par des blessures au cœur, qu'avait infligés les coups, la faim, la peur, ou l'absence. Il y avait souvent quelque chose qui les avait rendu fragiles, parfois un seul instant, un seul regard, des fois, des jours, des nuits, et pour d'autres nuits et jours. Parfois glisser vers elle, vous savez, ça commençait là. Et puis comme si quelque part ça ne suffisait pas, il avait fallu qu'ils créaient des fractures entre nos Mondes et le leur. Il y avait les principes et les valeurs, et puis le poids de nos réalités, et ceux qui le vivent, connaissent la différence. Et puis il y avait ce qu'ils attendaient de nous, les soit disant bonnes manières et les codes, qu'ils nous imposaient sans cesse. Les insultes qu'on faisait à la différence, à nos identités.. Ce que ça faisait, d'être toujours là où on en était... N'avoir rien, donnait l'envie d'en avoir. La famine, l'envie de se péter le bide. Les portes fermées, celle de les forcer. Et le rejet, l'envie de leur donner de vrais bonnes raisons pour le faire. En vrai,c'était arrivé à tout le Monde de s'y perdre parfois. On avait juste pas tous fini par glisser dans les mêmes choses vous savez, mais on était tous partis chercher à se faire une place quelque part. Mais ce que la Loi accepte ou pas, ça faisait leur différence. Il fallait bien comprendre, c'était pas forcément frontal. C'était pas un jour t'y étais alors que la veille t'y étais pas. C'était bien plus sournois que ça. Tu commençais avec des limites, et au fur et à mesure, souvent le soir, avec Madame courage, tu les faisais tomber les unes après les autres... Certains ont commencé pareil dans la C d'ailleurs. C'était un parcours, qui se faisait à la guise de ce que tu sais faire et du marché qui a à prendre. Et fallait bien comprendre qu'ici, dans le milieu, depuis des années déjà, les possibilités étaient grandes, dans d’innombrables secteurs...
Il y avait de la blanche, du jaune de toutes les couleurs. Des gants, de la corde, et de la gavure sur les hauteurs et partout dans la ville. De la femme, des trottoirs et des chiens de la casse à toutes les heures. Des contacts en Espagne, et des affaires à faire seul ou en famille. Certains avaient trouvé leur truc et c'étaient spécialisés dès le départ. Un qu'on a bien connu avait toujours préféré porter les gants. Et il était excellent. Il avait distillé, piloté, un peu par la suite, mais, c'était vraiment le Roi des voleurs, et dans la rue il était reconnu pour ça. Certains étaient plutôt du genre « touche à tout », ou de toutes les combines, Ça réussissait à certains, beaucoup moins à d'autres. Certains finiraient, qualifiés, voire très, c'était là dedans que certains, allaient finir par briller pour de vrai. Dans notre monde les mecs auraient pu avoir des cartes de visite, dans le leur, on changeait de trottoir quand on les croisait... D'autres aussi avaient fini par exceller par les carottes qu'ils avaient mises, mais il faut bien comprendre, que même les suiveurs ici avaient leur rôle à jouer, et finiraient d'une manière ou d'une autre, par être des personnages clés de l'histoire.
Ton parcours te faisait ta réput'. Celui qu'ils avaient vraiment donné à voir ou celui qu'ils s'inventaient. Ta réput' marchait avec toi. Enfin, ou ils marchaient avec elle. Il y avait celle qu'ils avaient vraiment, et puis celle qu'ils croyaient avoir, celle que dans leur dos on leur avait faite sans le savoir. Parfois rien que pour elle, vous savez, ils y avaient glissé un peu plus... Il faut savoir qu'ici, rien que ça parle. Les plus malins, travaillaient en solo et ne disaient rien, une grosse partie, pas aidée par la C, fanfaronnaient et parlaient trop . Une réput, c'est pas figée. Elle évoluait avec eux sur le parcours, au grès de leurs réussites et leurs échecs, leurs pions avancés à raison ou à tors sur la partie d'échecs. La réput', ça nous dépassait nous mêmes , et certains l'ont compris trop tard. Ce qui se dit de toi par rapport à ton équipe. Ce qu'on dit à cause de toi de ton équipe. Ah l'équipe, le sang, la famille ! Dis moi avec qui tu traînes, et je te dirais comment tu finiras. Parfois rien que pour elle, vous savez, ils y avaient glissé un peu plus... Du bon dans ce Monde là yen avait peu, mais, Des bons dans ce Monde là yen avait plein.
Ce Monde, il avait pas la prétention d'être honnête. Lui, il était clair d'entrée, il ne l'était pas. Et si certains ont pu l'oublier un jour, ils ont toujours fini par s'en mordre les doigts. Il est de ce genre de règles là. Lui, il disait pas de lui faire confiance, pour te la mettre le lendemain, Non ! Non ! Il te disait d'entrée que la confiance n'existe pas. T'étais prévenu, et ceux qui l'avaient oublié parfois, avaient un double trou le lendemain. Vous savez, à cause de ça souvent ils y avaient glissé encore un peu plus.. Il faut bien comprendre qu'y glisser encore un peu plus, c'était pas forcément apprendre à y faire pire, non ! Il y avait même pas besoin de ça. C'étaient juste, bouger rien qu' à peine tes lignes, les choses que tu pensais vrais, les choses en lesquelles tu pensais croire, et finirais par te donner de bonnes raisons de faire, des choses qu'hier tu n'envisageais même pas.. Et ce Monde là, il te donnait sans cesse des raisons de le faire. C'est comme ça qu'on a vu certains agneaux, devenir de très grands méchants loups. Et quand ça pouvait tourner mal, c'était comme ça qu'était écrite l'histoire de toute façon. Dans leurs bouches, on avait vu comme un moyen, de s'écrire une belle fin, en quelque façon..
Il était de ces choses là, qui les y avaient fait glisser un peu plus, et ce qui est fort avec elle, vous savez quoi ? C'est qu'il y a toujours moyen, d'y glisser un peu plus.
Ben's.
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