Dans la Rue principale de la Cour des Miracles, qui portait son nom,
celle qui mène de la grande à la petite place,
au numéro 5, il y avait une maison, qu'on appelait, la Maison du Bonheur.
Au rez de chaussée,
à droite de la grande porte bleue,
il y avait d'immenses fenêtres,
celles du peintre, grandes ouvertes sur le Monde...
En y passant pas très loin,
on pouvait entendre,
la voix et les cordes d'un poète venu d'ailleurs
que vive lo bonito sin peinas ni tormientos,
illustrer les traits de l'Artiste qui dessinait son Monde...
Ou, une chanson qui,
on aurait dit, chantait cette rue,
la magie des différences qui l'avaient faite.
L'air d'un poème Occitan, alors qu'il ne savait pas encore
O quant de temps encadra le faudra esperar per volar vers seis jardins..
Des rythmes blues et rock'n'roll,
qui avaient traversé l'Atlantique,
de sons qui lui restaient de l'époque où il rêvait d'être libre l'Artiste,
et qui l'avait mené là,
en plein cœur de la Cours des Miracles.
Passer devant et y voir écrit sur la fenêtre,
qu'il n'y avait pas d'arrangement possible.
Et il fallait y lire que si dans notre ville tout semblait si,
fallait pas attendre qu'ils reviennent,
et qu'on serait toujours de ceux qui les arrangeraient pas.
S'approcher et apercevoir une fête,
avec des inconnus du dehors au dedans.
Certains que l'on reverra, d'autres jamais.
Un rythme chaabi et l'air d'un accordéon,
des mots d'ici et d'ailleurs,
les notes d'une trompette sous la lune dans la Cours des Miracles...
Des âmes perdues ou pas, ici et là, de lui, d'elle, de eux, de qui que ce soit, de tout le monde...
Et ils s'en allaient à l'Aube, le mal de crâne heureux le lendemain.
Il y avait toujours quelqu'un pour s'arrêter à la fenêtre du 5.
Celui qui se fait servir un verre, un début de soirée d'été.
Celle qui tend la main en passant comme tous les jours.
Celui qui vient demander conseil ou service,
Celui qui vient sortir sa dernière grande phase...et des rires à la fenêtre.
Des derniers potins du coin, de lointains souvenirs et des débats sur le Monde.
De grandes pensées, dites justes là,
et de petites phrases inédites,
qu'ils captaient quand on passait devant les fenêtres,
le rire de l'Artiste et de sa fille dans la cuisine.
A travers ces fenêtres,
on entendait toujours s'encourager les espoirs.
Avec un, deux, trois coups à boire, les âmes errantes à leurs heures y trouver bibine et chaleur.
On y a entendu des discussions houleuses parfois, sous fond d'alcool,
et la voix d'une gamine s'élever, apprendre à remettre les pendules à l'heure.
Et tous ces mots qui sublimaient les pensées,
et le savoir qui nous promettait de nous armer contre le Monde.
Rimes, charades et jeux de mots, qui illustraient les jours,
Notes, couleurs et non-dits que les nuits nous laissaient deviner.
En regardant par la fenêtre,
on a aperçu des êtres différents,
apprendre à s'aimer d'un commun langage,
se confier leurs idées noires et belles , entre les murs de brique de la maison.
Ils s'asseyaient là, à la table de l'Artiste.
avec tout ce qu'il y avait de moche et de beau en eux,
toute leur âme entière,
car on pouvait être qui l'on est, auprès de l'Artiste.
Ils venaient de partout d'Occitanie et d'ailleurs,
mais comme chez eux dans la Maison du bonheur,
où l'autre faisait toujours, parti des jours..
On a entendu en passant devant les fenêtres du 5,
de longues discussions autour de la table.
Des débats qui ne se finissaient que quand compromis était enfin trouvé,
d'accords et de désaccords,
qui s'écoutent, s'exposent, et se réfléchissent,
d'une pensée qui se construit, se nourrie, s'établit,
sans jamais trop, rester figée.
De la philosophie merveilleuse sur la vie, comme elle l'est aussi,
et sur les difficultés qui l'avaient faites, parce que, on est ça aussi.
Des poésies et des couleurs, qu'il faisait même des choses sombres et malheureuses.
Des mots doux et des mots graves,
et l’œil bienveillant de l'Artiste qui donnait la liberté de s'élever là,
aux voix braves de demain...
Celles qui étaient là pour lui dire, alors qu'il allait bientôt s'en aller,
qu'il ne devait pas s’inquiéter,
qu'elles seraient là pour elle,
promesse à son oreille ou dans leurs prières,
comme pour lui rendre un peu de tout ce qu'il leur avait donné...
Après le départ de l'Artiste,
on a ouvert les fenêtres encore une fois.
Et beaucoup sont venu taper à la fenêtre de la maison du bonheur.
Ils voulaient s'y retrouver encore,
autour de la table qui leur avait donné place,
entre ces murs,qui avaient entendu un jour leurs espoirs.
Regarder une dernière fois à travers les fenêtres,
comment on s'ouvre sur le Monde avec elles.
Regarder une dernière fois à travers les fenêtres,
et se rappeler comment on peut être libre,
comme l'avait été l’Artiste.
Bens.
« La Rivière et sa source sont comme l'Homme qui lutte pour son idéal. Sa fin peut être glorieuse ou miséreuse, mais sa vie aura été une lutte, une recherche incessante. Je suivrai le conseil de cette inscription. Comme la source, j'essaierai d'atteindre mon but. Je lutterai dans la masse des Hommes, pour aller plus haut. Je surmonterai les mauvais moments. Comme la rivière atteint la grandeur de la mer, j'atteindrai le bonheur, grandeur de la vie. » Joap Ramond
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